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S3C : un risque grave confirmé : ce que révèle vraiment le rapport d’expertise demandé par le CSE.

Le 14 novembre 2025, le cabinet Émergences a remis au CSE du CEA Grenoble un rapport d’expertise qui fera date.

Ce document, déclenché par les élus face à une situation de tension chronique extrême et à l’échec des mesures prises par la direction, établit officiellement l’existence d’un risque grave identifié et actuel au sein du S3C, et plus particulièrement au LTI3D.

Derrière cette expression juridique, une réalité très concrète : des salariés en souffrance, des organisations épuisées et un système managérial qui ne protège plus.

Une intensification du travail hors de contrôle

Selon le rapport, le S3C est pris dans une mécanique d’intensification devenue structurelle. Il relève par exemple qu’au LTI3D, les salariés participent à 3,9 projets en moyenne, certains allant jusqu’à 9 projets simultanés, que les équipes doivent gérer des étapes techniques longues et fragiles, dans une salle blanche soumise aux aléas machines et au manque d’experts disponibles.

Cette dispersion extrême détruit la visibilité, empêche la maîtrise des délais et met les équipes sous pression permanente.

Le LETI évolue lui-même dans une contradiction structurelle : mener des projets de souveraineté technologique avec des ressources humaines limitées et dépendantes de financements instables.

Ce modèle génère une course aux projets qui rejaillit sur le S3C et alimente la surcharge.

Un management en grande difficulté

L’un des constats les plus sévères du rapport concerne l’encadrement. Les salariés font état d’un manque de soutien social et technique, d’une absence de disponibilité, d’un déficit d’écoute et de comportements parfois vécus comme blessants ou humiliants

Les experts soulignent que cette défaillance managériale amplifie la charge psychique des équipes et contribue à la perte de sens.

Le cas du LTI3D : un point de rupture

Le laboratoire LTI3D est identifié comme le point le plus critique du service.

L’éviction du chef de laboratoire début 2025, annoncée publiquement, a été vécue comme une “humiliation publique” par certains salariés et a provoqué un choc collectif majeur.

Le nouveau chef de laboratoire a été placé dans des conditions particulièrement difficiles, sans formation initiale adéquate, au milieu d’un climat déjà explosif et d’une défiance généralisée envers la direction

Selon les experts, la situation au LTI3D cumule surcharge extrême, perte de sens, tensions internes, effondrement du collectif, et absence de soutien hiérarchique.

Des conflits éthiques et une perte de sens grandissants

Le rapport souligne également des tensions éthiques émergentes : certains salariés vivent un décalage fort entre leurs convictions personnelles (environnement, sobriété) et les pratiques imposées par les technologies de microélectronique (consommation énergétique, métaux rares). Ce conflit de valeurs contribue lui aussi à la souffrance au travail.

Des recommandations fortes : réduire, réorganiser, protéger

Les experts ne se contentent pas de décrire : ils prescrivent.

Réduire le nombre de projets

Aligner l’ambition sur les moyens, sortir de la logique “toujours plus”, réduire les tensions entre équipes et la surcharge en salle blanche

Mesurer réellement la charge de travail

Créer un outil robuste, partagé et exploitable, ce qui implique aussi de réduire la taille des laboratoires pour rendre cette mesure possible

Stabiliser les équipes

Limiter le recours aux CDD, dont la formation longue (6 à 12 mois) surcharge les CDI et fragilise les compétences clés

Faire cesser les violences morales

Former la hiérarchie, mettre en place un repérage interne, intégrer les causes organisationnelles du harcèlement dans les dispositifs de prévention

Réorganiser profondément le LTI3D

Nommer un adjoint extérieur, réduire la taille du laboratoire, regrouper les thématiques 3D/Packaging, revoir son périmètre et reconnaître officiellement les erreurs de gestion passées

Respecter les obligations légales de prévention

Mettre à jour le DUERP et appliquer pleinement les articles L.4121-1 à L.4121-5 du Code du travail sur la prévention des risques professionnels

Un rapport qui oblige à agir

Ce rapport ne laisse plus de place à l’ambiguïté.

La dégradation du fonctionnement du S3C, surcharge, management en difficulté, perte de sens, réorganisation mal pilotée, place les salariés en situation de risque grave. Les faits sont établis, documentés et incontestables.

La balle est désormais dans le camp de la direction.

Le S3C ne pourra sortir de cette crise qu’en appliquant sans délai les recommandations exigeantes, mais nécessaires, formulées par les experts.

La CFE-CGC Électron Libre continuera d’informer, d’alerter et de défendre les personnels tant que la prévention ne sera pas réelle, visible et efficace.