Alors que le projet Convergence s’apprête à transformer le système d’information du CEA Grenoble, les équipes s’inquiètent de la charge colossale qui les attend. Formations, tests, arrêtés de comptes anticipés, nettoyage des données : tout converge vers une fin d’année sous haute tension. La modernisation se prépare, mais à quel prix pour les agents ?
Une préparation qui frôle la surchauffe
Le rapport d’expertise du CSE est sans détour : la période précédant la bascule informatique sera « particulièrement tendue ». Avant que les nouveaux outils ne soient déployés, les salariés devront cumuler leurs missions habituelles avec un ensemble de tâches supplémentaires : formations, participation aux tests logiciels, migration et nettoyage de données, clôture anticipée des comptes. Autant d’activités qui s’ajoutent à des emplois du temps déjà saturés.
Pour certains métiers, ces formations s’étendent sur plusieurs semaines. D’autres agents sont mobilisés dans la phase de recettage, c’est-à-dire les tests des nouveaux outils, tout en continuant d’assurer la production quotidienne. Cette double exigence crée un effet d’étau que beaucoup jugent insoutenable.
Des renforts temporaires, une solution fragile
Pour anticiper cette période critique, la direction a annoncé le recrutement temporaire de sept à huit équivalents temps plein (ETP). Mais l’expertise souligne que ces renforts ne suffiront probablement pas à absorber la charge réelle. Les personnels s’attendent à des semaines rallongées, à une pression accrue et à une fatigue croissante à mesure que la bascule approchera.
Les équipes du CEA Grenoble connaissent bien ce scénario : à chaque grande transformation, la charge augmente d’abord, et les gains de productivité promis tardent à se concrétiser. Les salariés, notamment dans les domaines RH et Finance, craignent un ‘choc de travail’ comparable à celui observé lors de précédentes réorganisations. L’expertise parle même de « période de travail particulièrement tendue ».
Une communication encore trop inégale
Autre sujet d’inquiétude : la communication autour du projet. Le rapport met en évidence une diffusion d’informations très variable selon les directions. Dans certaines équipes, les managers partagent régulièrement les avancées du projet ; dans d’autres, les agents découvrent les changements par des canaux officieux ou tardifs. Ce manque de transparence accentue la méfiance et complique la préparation collective.
La surcharge n’est pas seulement quantitative — elle est aussi psychologique. Ne pas savoir ce qui arrive, ou dans quelles conditions son poste va évoluer, crée un stress latent. Certains agents évoquent une ‘bascule à l’aveugle’, où la peur de l’erreur remplace la confiance dans les outils et les process.
La bascule informatique : un mur d’incertitudes
La bascule vers les nouveaux outils est prévue pour la fin de l’année 2025. Mais les experts soulignent un risque élevé de dysfonctionnements : pertes de données, retards de disponibilité, restrictions d’accès trop rigides. Les conséquences pourraient être sérieuses : impossibilité temporaire de passer des commandes, de payer les fournisseurs ou de traiter certaines opérations internes.
Le rapport note que si la direction affiche un discours rassurant, l’expérience passée des salariés avec d’autres projets informatiques invite à la prudence. La confiance s’est érodée au fil des réorganisations et des promesses non tenues. Convergence, malgré ses ambitions, s’inscrit dans cette continuité : une modernisation à haut risque humain.
Quand la modernisation tourne à l’épreuve
La surcharge ne se limite pas à un pic temporaire. L’expertise évoque la possibilité d’une intensification durable du travail, liée à la complexité des nouveaux outils et à la multiplicité des validations qu’ils imposent. Ce qui devait être un gain d’efficacité pourrait devenir un facteur de tension structurel. L’idée que ‘l’outil va soulager’ s’effrite face à la réalité : c’est souvent l’inverse qui se produit au démarrage.
Pour beaucoup, Convergence ressemble moins à une simplification qu’à une reconfiguration du travail sans réelle concertation. Les salariés font preuve d’un professionnalisme remarquable, mais la fatigue morale s’installe. La surcharge devient un symptôme de déséquilibre entre ambitions technologiques et capacités humaines.
Position CFE-CGC Grenoble
La CFE-CGC Grenoble alerte sur la dérive d’un projet dont la préparation risque d’épuiser les équipes avant même son lancement. Nous demandons :
• La mise en place immédiate d’un plan d’accompagnement RH renforcé pour la fin d’année 2025 ;
• Un suivi de charge hebdomadaire dans les équipes les plus sollicitées (Finance, RH, Achats) ;
• Des moyens pérennes, pas seulement temporaires, pour garantir la continuité du service ;
• La reconnaissance concrète de l’investissement des agents dans la réussite du projet.
