Le projet Convergence devait être un levier de modernisation pour le CEA. Il est devenu un révélateur : celui des tensions entre ambition technologique et réalité humaine. Pour la CFE-CGC Grenoble, ce chantier n’est pas seulement une refonte informatique — c’est un test grandeur nature du dialogue social au sein de l’établissement.
Une transformation à double tranchant
Depuis son lancement, le projet Convergence s’est imposé comme un symbole de la modernisation du CEA. Les intentions affichées sont légitimes : harmoniser les pratiques, fiabiliser les données, rendre les processus plus efficaces. Mais à mesure que la mise en œuvre progresse, les effets secondaires se font sentir : surcharge de travail, perte de sens, désorganisation temporaire et inquiétude face à la centralisation des décisions.
Le rapport d’expertise du CSE Grenoble ne remet pas en cause la nécessité du projet, mais il pointe une question essentielle : comment conduire un changement aussi massif sans fragiliser les équipes ? La technologie ne peut être qu’un outil, jamais une fin.
Des alertes précises, des réponses encore floues
L’expertise a mis en évidence plusieurs signaux faibles : surcharge ponctuelle avant la bascule, intensification durable du travail, et perte d’autonomie dans certains métiers. Ces alertes ne sont pas nouvelles, mais elles deviennent critiques dans un contexte de transformation globale.
Les réponses de la direction, souvent centrées sur l’aspect technique, restent insuffisantes. Former ne suffit pas, il faut accompagner. Moderniser ne suffit pas, il faut expliquer. Le dialogue social ne peut pas se limiter à valider les décisions après coup : il doit permettre de les co-construire.
Un besoin urgent de rétablir la confiance
Convergence a mis en lumière une fracture grandissante entre le siège et les sites. Les personnels de Grenoble expriment une lassitude face à un pilotage perçu comme descendant, parfois opaque. Les promesses d’écoute se heurtent à des délais, des circuits décisionnels longs, et une communication trop tardive.
Pourtant, les salariés restent profondément attachés à la mission du CEA et à ses valeurs de service public. Leur engagement est intact, mais il a besoin d’être reconnu. Rétablir la confiance passe par des actes : transparence, concertation et respect des rythmes humains.
Le dialogue social, clé d’une transition réussie
Un projet comme Convergence est un test grandeur nature pour le dialogue social. Il exige une coordination constante entre directions, représentants du personnel et experts du terrain. Le rapport recommande la création de dispositifs pérennes de suivi et d’évaluation après le déploiement, afin de mesurer les effets réels du changement sur la santé, la charge et la motivation.
La CFE-CGC partage pleinement cette vision : la réussite du projet dépendra moins du code informatique que du code social. La modernisation du CEA doit être collective, transparente et respectueuse de ceux qui en font la force.
Convergence : une opportunité à ne pas gâcher
Convergence peut être une réussite, à condition que le CEA en tire les bonnes leçons. C’est une occasion de repenser la manière dont l’établissement conduit ses projets, de replacer l’humain au centre de la performance. L’innovation ne se mesure pas seulement à la puissance des outils, mais à la capacité d’une organisation à donner du sens et de la stabilité à ses agents.
En somme, ce projet peut devenir un catalyseur de progrès collectif — ou, au contraire, un exemple de modernisation déshumanisée. Tout dépendra de la volonté de la direction à faire du dialogue social un véritable levier, et non une formalité.
Position CFE-CGC Grenoble
La CFE-CGC Grenoble considère le projet Convergence comme un tournant pour le CEA. Il peut incarner une réussite collective si la direction accepte de revoir sa méthode. Nous formulons les propositions suivantes :
• Créer un comité de suivi post-bascule, associant représentants du personnel, agents et experts ;
• Garantir une transparence totale sur les arbitrages et les impacts humains ;
• Mettre en place un plan de prévention des risques psychosociaux durable et transversal ;
• Redonner de l’autonomie aux sites dans la gestion opérationnelle du changement.
La CFE-CGC Grenoble défendra une vision constructive : celle d’un CEA moderne, performant, mais aussi juste et humain. Le dialogue social n’est pas une contrainte : c’est la condition de la réussite collective.
